Un enfoiré. C'est ça que tu as été quand tu l'as rencontré. Il a rassemblé son courage pour venir à ta rencontre et toi, tu l'as rembarré sans remord. Pourquoi d'ailleurs ? T'étais pas vraiment préparé à son arrivée dans ta vie comme ça. Et ta femme était pas au courant de son existence. Mais après qu'il soit reparti, tu lui as expliqué qui était ce gamin et comment dire que tu as eu sa main étampée sur la joue ? Clairement, elle n'avait pas aimé savoir comment t'as délaissé un de tes enfants comme ça pour te faire la douce vie ailleurs. Et peut-être qu'elle avait fait le calcul et avait vite compris ce que ça impliquait. Mais qu'est-ce que ça pouvait bien lui faire ce qui s'est passé il y a 28 ou 29 ans ? Tu trouves que c'était exagéré comme réaction, que ça me méritait pas une engueulade comme celle-ci, mais elle oui. Si tu n'étais pas la personne que tu es, ça aurait pu te faire culpabiliser, mais ça, on dirait que t'en es simplement las capable. Est-ce que ça t'a fait réfléchir ? Oui et non. Ça t'a pas amené ce genre de réflexion du genre Devrais-je prendre une chance de le découvrir? Essayer d'apprendre à le connaître ? Non. Toi t'as plutôt vu une occasion d'assouvir ta curiosité et peut-être même te divertir un peu. Égoïste était un peu comme ton deuxième nom. Tu pourrais au moins porter un minimum d'intérêt sur la personne que ton fils est, ne serait-ce que par principe que c'est ton enfant, que t'as lâchement abandonné. Mais non, ton cerveau fonctionne pas comme ça. Tout ce que tu veux, c'est voir à quel point il peut te ressembler. Et peut-être vérifier qu'il n'est pas lui aussi en train de prendre ce chemin menant à une grande noirceur. Serais-tu inquiet pour lui ? Mais non, ça ne serait pas possible. T'es même pas foutu de t'inquièter pour tes quatre autres enfants. Tu veux juste pas être relié à un Jonathan 2.0. Toi, traumatisé ? Peut-être un peu. C'est un peu pour cette raison que tu te retrouves à toquer à sa porte aujourd'hui et aussi par curiosité de voir sa réaction. Il s'attend sûrement pas à recevoir une visite de ta part.

Debout devant la porte, t'attends que ce fameux fils qu'est le tien vienne t'ouvrir. Tu es vraiment curieux de savoir comment il va réagir face à ta présence chez lui. Toi qui l'avais rembarré sans honte quand il s'est présenté chez toi. T'as même pas daigné reconnaître le lien qui t'unis à ce gamin. T'es un vrai bâtards quand tu t'y mets, soit trop souvent. Quand il ouvre enfin la porte, tu te permets de l'observer de haut en bas. Il est pas beau à voir, il a l'air dans un sale état. Tu ne peux t'empêcher d'avoir un regard emplie de jugement. Mais après, qui es-tu pour juger quelqu'un dont tu ne connais pas la vie ? Un rire se fait entendre de sa part quand il semble refuser ton apparition. Comme si t'allais écouter son opinion. Alors qu'il te fait dos, tu décides de t'imposer et rentrer. T'es venu jusqu'ici pour finalement le rencontrer comme ce gamin le voulait, tu vas quand-même pas rebrousser chemin. J'ai pas l'intention de partir donc va faire avec ma présence. Tu refermes la porte et te permets d'explorer un peu l'environnement dans lequel vit ce Noé. Ça fait pitié à voir, c'est sombre et... Loin de tes habitudes de luxes quoi. Ton regard laisse paraître ton dédain et tu ne t'en caches pas. Dis-moi Noé, tu vis constamment dans cette pénombre ? De quoi se taper une dépression. Non, tu n'as aucune honte à le juger. Après, tu sais très bien qu'il faut commencer quelque part. Tu le sais que trop bien. T'as dû le faire avec ta sœur quand tu as quitté Hamilton pour venir t'installer ici. Tu devais être un peu plus jeune que lui d'ailleurs. Ça n'avait pas été tes années les plus faciles, mais tu devais le faire, pour elle tu le devait. Donner une meilleure vie à ta soeur, meilleure que celle qu'elle aurait eu à la maison, celle de la fille de ce tueur. Toi, t'y es déjà très bien associé, mais si tu peux lui éviter cette association, tu vas le faire. Tu souliers en te tournant vers lui. Ça va peut-être te paraître étrange et insensé, mais je suis venu voir comment tu t'en sortais dans la vie. C'est à dire, t'assurer que c'est quelqu'un de sain, dans la mesure du possible.