Les fêtes de fin d'année approchaient doucement. Doucement, l'ambiance Noël s'installait et pour la première fois de sa vie, il le passerait ici, à New York, loin de son pays natal. Il aurait aimé pouvoir dire que la fête lui plaisait, parce que c'était tout joliment décoré et qu'on s'offrait des cadeaux, ce genre de chose. Seulement, ce n'était pas vrai. A vrai dire, Noël était une fête qui amplifiait plus son sentiment de solitude qu'autre chose. Si ce n'était pas avec ses parents - lorsqu'ils étaient disponibles - qu'il le fêtait, c'était avec d'affreux oncles et tantes, et d'autres gens qu'il ne voyait qu'à cette occasion. Depuis sa majorité, il avait décidé de mettre fin à tout ça et de le fêter entre amis, son frère inclus. Mais même là, c'était compliqué. Réunir tout le monde à cette période n'était pas chose aisée et bien qu'il faisait une fête énorme pour l'occasion, il n'était jamais pleinement satisfait.
En revanche, les choses positives durant cette période était... la nourriture. Il y avait des odeurs sucrées - même salées - à tout les coins de rues. Cookies, chocolat chaud, cannelle, orange, marrons grillés... tout était susceptible de provoquer son nez. D'ailleurs, il profita des petits stands qui avaient commencés à s'installer à l'extérieur, dans l'enceinte même de l'université, afin de pouvoir commencer à satisfaire son estomac. Du vin chaud, ici? s'était-il même étonné si bien qu'il avait sauté sur l'occasion pour s'en prendre un verre avant de rentrer dans un des bâtiments principaux pour être au chaud avant d'aller à son prochain cours. Ou plutot, avant d'aller pioncer à son prochain cours. Si seulement ce dernier pouvait être intéressant, mais même pas! Il savait qu'il allait avoir son diplôme dans tous les cas, mais quitte à subir les études, autant y apprendre quelque chose. D'une certaine manière, il souhaitait prouver à sa famille mais surtout à lui-même qu'il en était capable. Qu'il n'était pas l'insolent de service et qu'il pouvait faire des choses bien, qu'on attendait de lui. C'était un peu le jeu du renard qui se mordait la queue, parce que dans tous les cas, quoiqu'il fasse, il était perdant finalement.

Il venait de monter les marches du premier étage quand sa route croisa celle d'un garçon. Il était juste là, devant lui, lui barrant sans faire exprès la route et réciproquement, alors Ziggy arqua un sourcil : "Ouais? Tu comptes rester là longtemps à me regarder avec tes yeux de petit chien attendri ou c'est comment?" lui demanda t-il en regrettant d'être un peu brusque. Mais c'était plus fort que lui sur le coup. Des paires de yeux s'étaient tournés sur le moment, il soupira, agacé. La notoriété avait son revers de médaille et cela ne faisait pas exception. Il n'avait pas encore idée de qui il avait à faire. A vrai dire, il avait déjà entendu parler de lui mais il ne lui avait jamais fait face encore. Sans doute allait-il s'adoucir lorsqu'il le saura, ou peut être pas. A vrai dire, son cerveau ne réfléchissait pas actuellement, comme bien souvent. Ziggy était connu pour son impulsivité qui, lorsqu'il y pensait, était un réel frein. Il voulait pas l'être mais ça faisait parti de son caractère, malheureusement.

S'il y avait une position qui lui était défavorable dans cet établissement, c'était celle d'une dernière recrue. La raison même pour laquelle Ziggy devait faire ses preuves et imposer le respect qu'on lui devait. Il ne fallait pas qu'il se plie devant quiconque, autrement, sa crédibilité en prendrait un coup. Aussi, il ne fallait pas non plus attaquer trop directement, et à présent, le voilà dans une situation délicate. Le garçon qu'il avait en face de lui n'était pas un nouveau. Et vu la façon dont il se tenait, le torse bombant, confiant, il devait avoir assez d'assurance pour ne pas obéir aveuglément à ce que Ziggy lui avait dit. Il n'avait pas l'air non plus d'un pitre rebelle ou quoique ce soit dans le genre.
L'inconnu le détailla du regard et Ziggy en fit autant. Il était bien habillé, bien coiffé, propre sur lui. Ses fringues témoignaient d'une certaine richesse mais c'était sans doute trop peu pour pouvoir déterminer d'où il venait exactement. En tout cas, l'étudiant devant lui ne se laissa forcément pas démonter. Il lui répliqua de se pousser s'il souhaitait passer après lui avoir fait un "faux" compliment. Le genre de compliment qui ne faisait pas plaisir, non pas parce que le qualificatif était insultant, mais parce que le contexte de son emploi était dégradante. Ziggy refusa pour autant de se plier et il tâcha de garder son sang froid.

"C'est toi qui est dans mon chemin, alors laisse moi passer" rappela t-il d'une voix petite mais autoritaire. Aussitôt qu'il ait prononcé cette phrase, quelqu'un vint à la rencontre du jeune homme en face de lui pour le nommer Sanderson. Un nom qu'il avait entendu récemment d'ailleurs. Enfin... pas longtemps après son arrivée à l'université. Le Sanderson en question prit la chose à la rigolade et lorsqu'il revint à lui, il lui dit qu'il avait de la chance qu'il soit de bonne humeur. Un peu déstabilisé, non pas par le comportement de son "adversaire" mais par le nom qu'il avait entendu, il était en train de chercher où est ce que ça lui était venu aux oreilles.

"C'est possible ouais. Sanderson, c'est ça? Tu viens d'où?" demanda Ziggy en croisant les bras, patient. Un cours, là? Prrrr, il y avait désormais un peu plus intéressant. Pour combien de temps, il l'ignorait mais à présent, Sanderson occupait son attention.

Forcément, le jeune homme en face de lui était contrarié. C'était l'une des réactions à laquelle pouvait faire face Ziggy dans ce genre de moment. Pourtant, il n'était pas près de se démonter. Il comptait bien aller jusqu'au bout pour montrer qui il était et hors de question de se mettre à genoux. Plutôt mourir, bien que cette décision soit peut être un peu radicale en vue des circonstances. Mais Ziggy n'allait pas suivre ses conseils comme il l'avait dit. Ancien? Le blond détailla à nouveau la personne à qui il avait à faire. Il finit par remonter son regard vers lui et se mordit machinalement la joue en expression de jugement, histoire de rentre sa mimique encore plus insupportable.

"Ok boomer. Sache que je fais encore ce que je veux et comme je le répète, tu es dans mon chemin."

Pourtant, il avait noté l'effort que faisait son adversaire pour rendre la chose pas trop conflictuelle. Ziggy et le conflit, c'était une grande histoire d'amour. Parfois il faisait pire, parfois il était moins chiant. Alors il tapotait avec son pied, l'air patient. De toute façon, à moins de lui porter un coup dans le nez, il n'avait pas le choix. Cette option sera la dernière, il gardait encore assez d'humanité avant de passer directement à la violence.
Toutefois, l'intervention d'un autre étudiant envers cet "ancien" avait éveillé sa curiosité. Il l'avait interrogé sur son nom, Sanderson, et voulut savoir d'où il venait. Visiblement, l'ancien (décidément, ce surnom allait être adopté) donna son prénom et ne comprit visiblement pas où voulut en venir Ziggy lorsqu'il lui demanda d'où il venait étant donné qu'il lui répondit que ça ne le regardait pas. Ou peut être que si en fait, il voulait juste pas trop montrer son statut. Alors Ziggy émit un simple rire nerveux et moqueur à la fois avant que Brad Sanderson lui demanda lui, son nom car il avait le sentiment de l'avoir déjà vu sans savoir où.

"Mhhh, toutes les questions ne sont pas bonnes à poser Sanderson, souviens toi" répliqua t-il pour le narguer. "Mais ne t'en fais pas, tu l'apprendras tôt ou tard" avait ajouté l'étudiant juste après sous le ton de la promesse tout en lui tapotant doucement la joue alors qu'il se pinçait les lèvres, les yeux pétillants de malice. Une expression de défi plus qu'autre chose, il était en train de se demander encore comment il allait le mariner celui là. Qu'importait s'il se retrouvait au milieu d'une bagarre après tout, ça ne serait pas sa première et encore moins sa dernière.

Ca y était, les tensions montaient. Il devait l'admettre, Ziggy n'avait pas été agréable. Parfois, il dira qu'il n'était pas là pour cela mais là, ce qui l'importait, c'était surtout de 'faire ses preuves'. Il était aussi un peu con, mais ça, c'était pas nouveau. Le garçon, qui s'était poussé, se montra soudainement fermé. Ziggy commença à s'avancer mais il ne le dépassa pas encore, restant à son niveau. A sa question, il fit mine de méditer quelques secondes : était il casse couille habituellement ou c'était seulement pour l'emmerder? En voilà une question intéressante. Il finit par hausser les épaules et reprendre son air malicieux insupportable.

"Je dirais que c'est les deux."

Il éclata de rire à la réaction de Brad Sanderson lorsqu'il reprit exactement les même paroles qu'il lui avait sorties. Ce dernier lui répliqua d'un ton ferme qu'il n'avait pas de temps à perdre avec lui et Ziggy leva les mains d'un air innocent.

"Cela tombe bien puisque moi non plus. Mais... Je t'aime bien mine de rien, Sanderson. Je crois que tu es quelqu'un d'important, pas vrai?"

Il creusait un peu plus en profondeur la question puisque mine de rien, bien que ce dernier avait refusé de lui répondre, il avait envie de savoir comment ce nom ne lui était pas méconnu. Et il avait à peu près la certitude qu'il était affilié à lui de près ou de loin. Il était plutôt beau gosse aussi, propre sur lui, chic. Le genre de type avec qui, si Ziggy ne l'avait pas testé aussi agressivement, il pourrait bien s'entendre.

Aah Ziggy, il en pouvait s'empêcher d'être pénible quand il s'y mettait. Au moins, il avait trouvé ce qu'il cherchait : le conflit. En même temps, c'était inévitable, à moins d'avoir à faire à quelqu'un qui l'évitait à tout prix et qui avait trop peu confiance en soi. Les gens étaient drôlement fait quand on y pensait. Et il aimait ça, Ziggy, avoir du répondant. Ses menaces de le trouver au cas où il le cherchait trop, ça le faisait frémir.

"Oh mais j'espère bien" dit-il d'une semi voix, quasi juste audible pour que seul Brad Sanderson ne l'entende. Il recula légèrement vers l'arrière, les mains dans les poches. Il pourrait juste s'en aller, d'ailleurs, il avait pour idée de partir et laisser les choses comme cela. De toute façon, ils allaient certainement se recroiser et tout comme Sanderson, il avait d'autres chat à fouetter lui aussi. Mais bon, c'était amusant, divertissant cette rencontre.
Plus cela allait, plus Ziggy se rendait compte qu'il nourrissait la provocation vis à vis de cet individu. A chaque fois, ça l'excitait, mais il ne fallait pas non plus trop tirer sur la corde. Il se pinça les lèvres lorsque Sanderson lui "conseilla" de ne pas dire des choses pareilles sans savoir à qui il avait à faire.

"Mhhh, vraiment? Et donc, à qui ais-je à faire monsieur Sanderson?"

Après tout, c'était là l'origine de sa question de base. Ziggy en avait conscience, qu'il avait à faire à quelqu'un mais il cherchait à savoir qui. Un nom ne suffisait pas pour le newbie égocentrique qu'il était à se rendre compte des "autres", en particulier lorsqu'il ne les avaient pas encore vus. D'ailleurs, lorsque Ziggy enchaina sur le fait qu'il avait compris qu'il s'opposait à un type important, ce dernier répliqua que cela dépendait et qu'il ne fallait pas se fier à ce qu'on racontait. A ces mots, Ziggy arqua un sourcil. Puis il refit son sourire péniblement benêt, exprès lorsque Brad Sanderson lui demanda ce qu'on lui avait dit.

"Aaah, si tu savais..."

Il s'esclaffa avant de se rapprocher de lui pour se positionner juste devant, là, bien proche.

"Tu sais ce qu'il y a de drôle Sanderson? C'est qu'on ne m'a strictement rien dit à ton sujet. En fait, je lis en toi comme un livre ouvert. J'observe ta tenue, ta façon de parler, tu me mets en garde de ne pas dire des choses lorsqu'on ne sait pas à qui on a à faire... Je suis dans le même monde que toi, tu vois. Je s-a-i-s. Alors vas y, dis moi, que devrait-on ne pas me dire à ton sujet, Brad?"

Il avait prononcé son prénom de façon plus aiguë, pas vraiment en guise de moquerie mais plutôt parce qu'il le cernait et qu'il voulait le lui faire comprendre. Au moins, Ziggy s'étiat un peu calmé sur la provocation, quoique, il en était pas à son reste pour le moment.